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LE BLOG BD/MANGA de Fabien Tillon
24 juin 2007

Abstraction comique : Moma et Popa

couv_comic_abstraction

Du 4 mars au 11 juin, s'est déroulé au Musée d'art moderne de New York (le MOMA), une exposition très pertinente. Désolé, j'arrive un peu en retard sur cette information ! Mais je n'ai appris l'existence de cet évènement qu'en fouillant dans la librairie d'art Yvon Lambert, ce week end. Je suis tombé sur le catalogue de l'exposition, fort beau au demeurant. Il s'agit de l'exposition Comic abstraction, image-breaking, image-making, soit une tentative de présentation (non-exhaustive) des liens de plus en plus étroits entre la bande dessinée/animation et l'art contemporain. Les oeuvres d'une douzaine d'artistes sont présentées, dont celles de Takashi Murakami, que j'évoquais dans mon propre ouvrage Culture manga. Le catalogue de l'exposition, rédigé par Roxana Marcoci, rend justice à une foule d'autres graphistes plus ou moins connus du grand public. Par exemple, le français Philippe Parreno, qui installe des phylactères en plastique au plafond des musées, bulles échappées de planches de bande dessinée (ou de nos vies ?) et qui se rassemblent ensuite en troupeau, sans destin autre que l'attente ou le vide de l'absurdité... Ou encore Rivane Neuenschwander, qui s'inspire du personnage de Zé Carioca, inventé par Walt Disney et récupéré depuis par la bande dessinée brésilienne, dans une série de toiles dont l'enjeu est la disparition des décors et des personnages, pour laisser apparaître la trame des couleurs et la présence, étonnante et décorative, des bulles (encore elles !). On s'aperçoit du reste que, dans ce dialogue entre BD et art, ce qui compte ce sont les thématiques, celles de l'enfance notamment, confrontées dans de nombreuses oeuvres à une vision plus adulte, d'où un décalage parfois cruel - comme dans les oeuvres d'Arturo Herrera, qui confronte la sexualité au monde enchanté de Disney. Mais ce qui compte aussi, ce sont les purs enjeux esthétiques. Où l'on admet que la BD est un art graphique à part entière, dont la fréquentation peut donner à voir. La fascination des bulles, objets étonnants par leur rotondité toute féminine et le poids symbolique qu'elles supportent, mais aussi d'autres objets esthétiques, comme la case, prouvent l'étonnement toujours recommencé des plasticiens contemporains pour cet art si neuf, encore à découvrir : le 9ème art.

Speech Bubbles, par Philippe Parreno, 1997

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Deux remarques, pourtant, au sujet du catalogue de l'exposition. Adoptant un point de vue très américano-américain, Roxana Marcoci commet quelques erreurs dans le domaine de la BD (notamment, elle fait remonter la naissance de la bande dessinée au Yellow Kid américain, ce qui n'est pas le point de vue de la recherche en France, qui privilégie, comme date de naissance de la BD, la travail de Rodolphe Toepffer, artiste suisse, dès les débuts du 19ème siècle - Marcoci évoque bien Toepffer, mais en note de bas de page et pour le qualifier de simple précurseur - vieille querelle...). Plus important, on regrette l'absence dans le catalogue d'une évocation complète de l'école française de la figuration narrative, pourtant si proche de la bande dessinée dans son esprit et dans sa forme. Idem pour l'extraordinaire créativité du groupe Bazooka, à la fin des années 70 - lorsque la France était précurseur dans le domaine de la rencontre entre BD foudroyée et graphisme foudroyant...

A quand une exposition rendant justice à tout cela... en France ?

Adresse de la librairie Yvon Lambert, où l'on peut se procurer la catalogue : 108, rue Vieille-du-Temple,

75 003, Paris, 01 42 71 09 33.

Lien sur le site du MOMA (en anglais, hélas) :

http://www.moma.org/exhibitions/exhibitions.php?id=2865.

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